Climat : Changement climatique et événements extrêmes

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La circulation méridienne de retournement est l’un des principaux systèmes de circulation de la chaleur terrestre : il distribue, vers les hautes latitudes, les eaux chaudes des basses latitudes. Dans l’hémisphère Nord, c’est aussi ce qu’on appelle la dérive nord-atlantique et par extension, le Gulf Stream. Elle est, en partie, à l’origine du climat tempéré que l’on connait dans l’ouest de l’Europe du nord. Or, des scientifiques viennent de confirmer que cette circulation s’essouffle bien…

La circulation méridienne de retournement (CMT), également appelée « circulation thermohaline » se compose notamment de la dérive nord-atlantique qui contribue à la douceur du climat de l’Europe occidentale. Cette prolongation du courant chaud, le Gulf Stream, transporte une partie de la chaleur tropicale du golfe du Mexique vers l’Atlantique nord, et joue donc un rôle majeur dans l’équilibre climatique que nous connaissons.

Or, des observations multiples et concordantes montrent que ce système de courants s’affaiblit comme jamais au cours du siècle, après une stabilité millénaire. En cause : la fonte graduelle, et qui s’accélère, de la calotte glaciaire du Groenland, engendrée par le réchauffement climatique.

« On voit clairement qu’une zone précise de l’Atlantique nord se refroidit depuis un siècle alors que le reste de la planète se réchauffe, » (voir image ci-dessus) indique Stefan Rahmstorf du Potsdam Institute for Climate Impact Research, le principal auteur de l’étude parue en 2015 dans Nature Climate Change. Les recherches antérieures avaient déjà montré que le ralentissement de la circulation thermohaline pourrait en être la cause. « Désormais, nous avons détecté des signes forts : la courroie de transmission globale a bien perdu de sa vigueur au cours du dernier siècle, et plus particulièrement depuis 1970, » précise Rahmstorf.

Du fait de l’absence de mesure directe de long terme sur les courants océaniques, les scientifiques se sont surtout appuyés sur les relevés de température atmosphériques et des eaux de surface. De plus, ils se sont basés sur des données de substitution, provenant de carottes de glace, d’anneaux de croissance des arbres, de coraux, et de sédiments océaniques et lacustres – les températures peuvent être reconstituées sur plus d’un millénaire. Résultat : les changements récents notés par l’équipe sont sans précédent depuis 900 ans avant notre ère, ce qui constitue une preuve supplémentaire de l’implication d’un réchauffement global dû à l’activité humaine.

« La fonte de la calotte glaciaire du Groënland perturbe probablement la circulation »

La diminution de la circulation thermohaline est causée par des différentiels de densité des eaux océaniques. Au niveau de l’océan Atlantique Nord, l’eau chaude (donc plus légère) du sud s’écoule vers le nord, tandis que l’eau froide (donc plus lourde) du nord s’enfonce dans l’océan et s’oriente vers le sud. « Aujourd’hui, l’eau douce libérée par la fonte de la calotte glaciaire du Groenland interfère probablement avec cette circulation, » explique Jason Box du Geological Survey du Danemark et du Groenland.

L’apport en eau douce des glaciers allège l’eau océanique, car l’eau douce n’est pas salée : moins elle est salée et moins l’eau est dense et donc moins elle a tendance à descendre dans les profondeurs. « Ainsi, la perte de masse de la calotte glaciaire du Groenland imputable à l’homme semble bien freiner la circulation méridienne de retournement de l’Atlantique, et cet effet pourrait s’amplifier si nous laissons les températures grimper davantage, » ajoute Box.

Le refroidissement observé dans l’Atlantique Nord, juste au sud du Groenland, est plus important que ce que la plupart des simulations informatiques du climat ont pu prédire à ce jour. « Les modèles climatiques traditionnels sous-estiment la réalité du changement en cours, soit en postulant une trop grande stabilité des retournements de l’Atlantique soit en sous-estimant la fonte de la calotte glaciaire du Groenland, ou pour les deux raisons, » dit Michael Mann du Pennsylvania State University (USA). « Il s’agit d’un nouvel exemple d’observations qui montre que les prédictions des modèles climatiques sont par certains côtés trop conservateurs pour estimer la vitesse à laquelle se produisent certaines manifestations du changement climatique » ajoute-t-il.

1 risque sur 2 que l’Europe connaisse un refroidissement brutal.

La diminution voire l’arrêt de la circulation thermohaline dans l’hémisphère Nord fait craindre un refroidissement net au-dessus de l’Atlantique Nord, ce que les scientifiques appellent un changement abrupt de température[1].

Ce risque, popularisé mais exagéré par la fiction « Le Jour d’Après« , a été estimé par une équipe de chercheurs du laboratoire Environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux (CNRS/Université de Bordeaux) et de l’Université de Southampton dans une étude publiée en février 2017 dans Nature Communications.
Ils ont développé un nouvel algorithme pour analyser les 40 projections climatiques prises en compte dans le rapport du GIEC de 2013. Cette nouvelle étude fait grimper la probabilité d’un refroidissement rapide de l’Atlantique Nord au cours du XXIe siècle de 10 % à près de 50 % !

Quelles conséquences sur l’Europe ?

Un tel phénomène pourrait intervenir d’ici seulement 20 ans et se mettrait en place en moins de 10 ans ! Un véritable changement abrupt de température qui se traduirait par un refroidissement très rapide de 2 ou 3 degrés dans la région de la mer du Labrador – l’une des rares zones de la planète qui ne se réchauffe pas depuis le début des relevés planétaires de températures. Cet arrêt du Gulf Stream, irréversible, pourrait induire « de fortes baisses des températures dans les régions côtières de l’Atlantique Nord » (CNRS, 02/2017). C’est la côte ouest de l’Europe (de la Grande-Bretagne à l’Espagne, au Portugal en passant par la France) qui perdrait 1 à 2°C en moyenne, c’est davantage que le petit âge glaciaire qui sévissait sur l’Europe occidentale au XVIIe siècle, mais cela nous éloigne d’un âge glaciaire où les températures plongent en moyenne de 6°C.

Outre la baisse de température qui pourrait ébranler l’agriculture, les écosystèmes et la production d’énergie des pays concernés, les conséquences pourraient être multiples et planétaires en intervenant sur le stockage océanique du CO2.

Cependant, les chercheurs estiment que ce refroidissement, localisé, n’aurait qu’un impact très faible sur la poursuite du réchauffement planétaire.

Notes

  1. « Variations de température de plusieurs degrés, survenant en moins de dix ans, sur une surface de plus d’un million de km² » (Giovanni Sgubin, climatologue à l’Université de Bordeaux interrogé par Science & Vie)

Voici un document vidéo démontrant la formation impressionnante d’une tornade ainsi que le résultat d’un impact de foudre dans une rivière.

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