Économie : Bitcoin, illusions et désillusion (En route vers le concept Ardor)

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J’ai un avis mitigé sur le bitcoin. Tout avait bien commencé avec un concept de blockchain assez révolutionnaire. Un réseau peer-to-peer permettant des échanges sans qu’aucun tiers de confiance ne soit nécessaire. Une bande d’amateurs de crypto dans un monde post-crise financière se disant qu’ils n’avaient pas besoin de gouvernement ou d’institution pour créer une monnaie.
Et puis, en grandissant, les limites du système sont apparues : une impossibilité d’évoluer (cf le débat sans fin sur les tailles de bloc), une consommation énergétique stupide, une taille de blockchain n’en finissant pas, une centralisation du pouvoir de minage,…

Avec le succès du bitcoin, nombreux sont ceux qui ont tenté de surfer sur la vague. On a d’abord eu tout ceux qui reproduisent le modèle qui fonctionne en modifiant 2, 3 variables (litecoin, dogecoin et autres ersatz de bitcoin). Certaines vont ajouter des fonctionnalités intéressantes (meilleur algorithme de minage, plus d’anonymat, plus rapide,…) mais sans changement révolutionnaire, elles sont souvent sans autre intérêt que spéculatif.

Et puis, on a les altcoins, souvent surnommées « Bitcoin 2.0 », qui vont réellement changer le principe de fonctionnement. On pense par exemple à Ethereum qui a été la cryptocoin du moment et a fait beaucoup parler d’elle lors d’un hack qui a entraîné un fork de la monnaie. En dehors de cette gestion de crise critiquable (mais cela est une autre histoire), on a là un système réellement différent du bitcoin.

Mon but n’est pas de présenter le vaste monde des altcoins mais de parler d’une injustement peu connue : Nxt.

Nxt est sûrement un des systèmes les plus révolutionnaires de cryptocoin. Créé en 2013, c’était un des premiers systèmes à ne pas être un fork du code de bitcoin.

Proof-of-stake

Nxt n’utilise pas le mécanisme de consensus habituel de proof-of-work. Dans bitcoin, la difficulté de minage, l’activité qui sécurise le réseau (et accessoirement récompense avec des bitcoins), augmente continuellement et est responsable d’une consommation électrique à vomir. Ma conscience écologique ne peut soutenir un système déjà aussi énergivore qu’un pays alors qu’il ne concerne encore qu’une niche de la population.

Dans le proof-of-stake, le mécanisme n’est pas celui qui a le plus gros GPU mais celui qui a le plus de richesse. Plus de pièces un utilisateur possède, plus il a de chance de forger (on ne parle plus de miner) le bloc suivant. Forger ne sert plus qu’à valider les transactions en cours et requiert une fraction de l’utilisation du processeur. Pour donner un exemple, je forge via un raspberrypi.

La critique du système est que c’est un pouvoir aux riches permettant aux riches de devenir encore plus riche. Sans défendre un tel système, je tiens à faire remarquer que:

– c’est également le cas avec le bitcoin, seuls les riches peuvent se permettre une ferme de minage consommant des GW pour accumuler encore plus de bitcoins
– une personne riche a peu d’intérêts à attaquer le système : si on a vu des attaques à 51% récemment sur des monnaies PoW basée sur Ethereum (il suffit de louer des machines pendant quelques heures), faire une attaque à 51% sur une monnaie PoS implique d’avoir déjà acheté la moitié des pièces et de faire perdre sa valeur à notre investissement.

Pour l’anecdote, un article critiquant proof-of-stake calcule qu’il faudrait plus de 1000 ans pour que le plus riche possesseur de NXT obtienne plus de 51% via le stake. On a de la marge.

Proof-of-stake n’est certainement pas un système parfait (se pose aussi le complexe problème de la distribution initiale) mais proof-of-work ne me semble simplement pas viable en grandissant.

Plateforme

Nxt n’a pas pour vocation de devenir une monnaie concurrente au bitcoin. Lorsque l’on utilise le terme crypto-monnaie, les gens ont tendance à l’envisager comme un moyen d’acheter des biens. Cependant, Nxt permet bien plus que cela : en plus de la myriade de fonctionnalités directement inclues dans le client (coinshuffle, intégration shapeshift,…), il se comporte en plateforme pour usages divers :
– une messagerie (chiffrée ou non)
– un système de vote publique
– un magasin en ligne
– un stockage distribué

Si cela ne suffisait pas, il permet la création d’assets et même d’autres crypto-monnaies.

En bref, un asset permet de distribuer des parts (pensez actions ou tickets de concert) que les gens peuvent s’échanger librement tandis qu’une monnaie permet de créer réellement sa monnaie proof-of-stake en quelques clics.

Nxt permet de servir de plateforme pour les assets et monnaies naissantes en bénéficiant de la sécurité et robustesse du réseau tout en masquant les difficultés techniques.

Ardor

Toute cela est très bien mais ce n’est pas encore suffisant. Il reste deux points problématiques dans le système actuel:
– en grandissant, la blockchain devient obèse et difficile à manipuler
– les assets et monnaies payent toujours leurs frais de transaction en NXT

La première est commune à toutes les chaînes gagnant un peu de succès. Il est illusoire de vouloir télécharger la blockchain Bitcoin (on approche des 100GB cette année) sur son smartphone par exemple. Et ça ne fait qu’empirer.
Si Nxt atteignait la taille de Bitcoin, le problème se poserait probablement aussi.

La deuxième rend le système moins attractif pour créer sa propre crypto-monnaie puisqu’il force les utilisateurs à continuer d’acheter des Nxt pour les transactions.

Pour régler ces problèmes, l’équipe de développeurs est en train de mettre au point Ardor, une sorte de Nxt 2.0 (un Bitcoin 4.0 donc ?).

Ardor sera une blockchain qui aura pour but de supporter les child chains uniquement. Fini les votes, stockage, messagerie et autres sur Ardor. Toutes ces fonctionnalités restent mais sont déplacées sur les chaînes enfants.

Ardor et les chaînes enfants intégreront un mécanisme de purge pour ne garder que les dernières transactions pour maintenir une taille faible du réseau même en cas de forte croissance. Un système de hash sera intégré pour s’assurer que l’historique n’a pas été altéré.

Le deuxième problème est également réglé. Les transactions sur les chaînes enfants seront payées dans la monnaie de celle-ci. Pour supporter le réseau, ces frais de transactions seront reversés aux bundlers, des personnes payant des frais en Ardor pour transmettre les transactions à tout le réseau.

Le principe économique sera donc que, tant que la chaîne enfant aura de la valeur, des bundlers accepteront de payer les frais de transactions en Ardor. Si la valeur du token enfant diminue, les frais devront augmenter pour que le bundler continue de les accepter.

Si tout se passe bien, tout cela sera caché aux yeux des utilisateurs qui ne devront pas se soucier des bundlers ou d’Ardor. Un utilisateur d’une chaîne enfant n’aura même pas besoin de savoir qu’elle fonctionne sur Ardor !

Future

Si après tout ce blabla, vous êtes convaincus d’acheter des NXT, vous vous êtes sans doute rendu compte que le cours du NXT a grandement chuté ces derniers mois. Cela est du à la phase de transition entre Nxt et Ardor.

Au stade actuel, Ardor n’est pas encore déployé. Les développeurs de Nxt ont annoncé une feuille de route pour fin 2017 pour prendre le temps de développer la nouvelle solution.
Cette semaine, des tokens de Ardor ont été distribué aux possesseurs de NXT comme un asset. S’il y avait un motif de garder ses NXT, celui-ci vient de tomber et est vu comme un projet sans avenir auprès des traders.

Vu qu’il reste encore un an avant que Ardor ne soit déployé et que Nxt restera parfaitement fonctionnel après cela (la magie des blockchains), il n’y a pas de raison de ne plus l’utiliser. De plus, un prix faible veut dire des frais de transaction faibles ce qui le rend encore plus attractif comme plateforme (et non comme monnaie).

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